Faire (parfois faire-faire) et faire savoir !
Utile document que celui qui vient d'être publié ces jours-ci par le ministère de la Défense pour présenter la politique de défense et de sécurité de la France en Asie-Pacifique. Classique pour un document de cette nature, l'organisation s'articule autour des intérêts propres à la France et partagés avec ses partenaires à l'échelle globale et régionale, les risques et les menaces liés à la zone, et les différents outils mis à disposition pour la participation au renforcement des capacités de souveraineté des états de la zone (les engagements, les accords, la coopération structurelle et opérationnelle, l'industrie d'armement et le soutien à l'exportation).
Sur la forme, la clarté (avec de très utiles cartes, notamment sur les accords internationaux de la zone, la présence militaire française et le réseau de coopération : exercices, attachés de défense ou de sécurité, etc.) et la concision (une vingtaine de pages présentée de manière moderne) ne sont pas les moindres de atouts pour prouver, témoigner et expliquer efficacement l'engagement de la France dans cette zone. L'existence (dès sa parution...) d'une version en Anglais (comme cela avait été le cas pour le Livre blanc) en fait un outil pratique, à même d'être largement diffusé auprès de nos partenaires.
Sur le fond, la stratégie comme art d'agencer /coordonner des ensembles pour atteindre des objectifs apparaît de manière plutôt convaincante dans ce document, en faisant appel aux nombreux outils qui font que l'affirmation "La France est une puissance de l'Asie-Pacifique" s'avère crédible. UNE puissance dans la zone, non LA puissance, évidemment.
Un tel effort pédagogique était nécessaire, de récents événements ayant pu soulever des questions sur cette réalité. C'était le cas notamment :
- à la publication du Livre blanc, très engageant et volontaire sur l'ambition de la France dans la zone mais où les moyens pour réaliser les fins n'apparaissaient pas clairement ;
- lors du super-typhon aux Philippines en novembre 2013 où la France brillait par son absence dans la grande mobilisation internationale ;
- plus récemment lors des recherches du vol MH370 de Malaysian Airlines, où la communication sur l'aide apportée par la France (satellites, enquêteurs, etc.) prenait plus d'une semaine.
Ce document offre ainsi un panorama particulièrement complet à l'instant T, faisant apparaître surtout des actions haut de gamme selon une approche "top-down" (coopération de haut-niveau, dialogues stratégiques, etc.). Pour le mettre en perspective, cela permet de montrer un modèle fins-moyens différent de l'approche mixte menée en Afrique à la fois par le haut mais aussi par le bas, via, par exemple, de très nombreuses actions de formation d'unités élémentaires (Terre, Mer et dans une moindre mesure Air).
Néanmoins, ce panorama peut paraître un peu figé, sans faire apparaître clairement les perspectives à court et moyen terme, sauf, peut-être de manière indirecte, en appelant à : au minimum, maintenir la position actuelle, au mieux, l'améliorer en convainquant pleinement les sceptiques de la légitimité à affirmer que la France est une puissance dans la zone.
Pour cela, il est donné en exemple quelques efforts à court terme : la participation française au projet ASEAN Community 2015, une adhésion envisagée à l'accord ReCAAP de lutte contre la piraterie maritime, une coopération étendue prochainement à la Mongolie, etc.
Au final, ce document est un exemple assez réussi de déclinaison du LBDSN par segments qui pourrait être utilement dupliqué dans d'autres zones (l'Amérique du Sud ou l'Asie centrale, par exemple ?) ou dans d'autres secteurs. Si "le concept d'emploi des forces" a été publié pour la partie opérationnelle, quid d'un document public pour les efforts en RetT, ou plus globalement pour l'industrie de Défense ?
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