vendredi 17 octobre 2008

René Girard et Gustave Le Bon étaient-ils au Stade de France ce 14 Octobre au soir ?

Ou comment aborder cet événement sans revenir sur les questionnements concernant « le passé français qui ne passe pas » au sujet de nos rapports avec nos anciennes colonies, sur « l’intégration » en France des populations immigrées (les nombreux changements intervenus après les émeutes de novembre en banlieues montrent bien que le débat d’idées est utile puisque rien ne change...), sur la valeur des principes véhiculés par le sport (cf. Pascal Boniface de l’IRIS), sur les efforts faits pour désamorcer une situation courue d’avance et enfin sur les calculs concernant le nombre de français non issus de l’immigration, de français issus de l’immigration, de franco-tunisiens et de tunisiens présents ce jour là à la grande messe du football et de la réconciliation des mémoires.

La longue succession des rendez-vous ratés entre des équipes nationales du Maghreb et l’équipe de France, me font penser à une volonté de compétition entre les publics. Certains spectateurs de cœur, d’origine ou de nationalité tunisienne comme les Marocains et les Algériens avant eux, se devaient presque, de faire mieux ou au moins autant que leurs voisins géographiques. Se faire remarquer en sifflant plus fort (une obligation presque) : n’est ce pas ce qui s’appelle derrière une notion un peu plus complexe que cette simple description, le « désir mimétique » de l’anthropologue René Girard ? Les hommes sont des êtres de désir avec la volonté qui se propage d’imiter leurs semblables pouvant mener à une rivalité (« rivalité mimétique » pour en faire plus que les voisins) avec l’apparition d’un « bouc émissaire » (ici la Marseillaise). A vous de juger.


Ensuite, revenons sur une mesure annoncée par le gouvernement qui s’est empressé de dénoncer les faits (un minimum). A la sortie d’une réunion de crise avec le Président de la FFF (pourtant, on dit souvent qu’il faut toujours agir avant que le feu ne s’allume en ne se voilant pas les yeux sur les risques d’incendie), la mesure phare prise a été l’arrêt des matchs si les hymnes sont sifflés. Moins bête à mon sens mais bête comme même, que la proposition d’un quotidien sportif qui s’interrogeait sur la pertinence de jouer les hymnes avant les matchs internationaux : comment donner raison à quelques personnes, montrer un nouveau signe de faiblesse, être sur la défensive voir même sur la reculade… Les internautes ont eu alors le bon gout de voter contre cette mesure lors du sondage.

Disséquons un peu l’utopie de cette mesure sans doute prise sans l’avis d’un responsable de la sécurité intérieure un tant soit peu formé à la gestion des foules. Ce qui peut montrer qu’apparemment comme les militaires, les policiers ou les gendarmes ont du mal à se faire entendre auprès des hautes instances dirigeantes. Extrapolons un peu : des sifflets ponctuent les hymnes, il y a donc interruption du match, retour aux vestiaires des acteurs et ensuite évacuation d’un stade. Et c’est là, qu’à mon avis, le bât blesse. Car Mardi, il y avait que 600 à 700 forces de l’ordre pour 75.000 visiteurs. L’évacuation se serait passée dans le plus grand calme que cela soit dans les tribunes, autour du stade ou dans les rues adjacentes de la Plaine Saint Denis. Tout le monde aurait pris bien sagement le RER… Aucun énervement, aucune casse, aucun leader, aucun phénomène de bandes, tout le monde rapido au dodo chez soi : « Tout est bien dans le meilleur des mondes ».


Alors relisons quelques pages de Gustave Le Bon avec le recul nécessaire, qui s'est intéressé aux phénomènes des foules (dans son étude : une réunion d’individus soumis à une loi d’unité mentale). Écrits qui restent d’une grande actualité pour le maintien de l’ordre ou l’étude des manifestations : « Par le fait seul qu'il fait partie d'une foule, l'homme descend donc plusieurs degrés sur l'échelle de la civilisation. Isolé, c'était peut-être un individu cultivé, en foule c'est un instinctif, par conséquent un barbare. Il a la spontanéité, la violence, la férocité, et aussi les enthousiasmes et les héroïsmes des êtres primitifs ».

Sinon des mesurettes et des mesures à peine annoncées que déjà impossibles à mettre en place, ils risquent d’y en avoir d’autres…

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